CHRONIQUE LA FRANCE épisode 2
RURALE
Je rurâle
Tu rurâles
Il / Elle rurâle
…
Je ne regarde plus la télé. Je regarde vos stories instagram.
Putain même là il y a des pubs.
Je regarde des zappings, que du condensé. J’ai plus le temps de vivre tout ce qui sort.
Putain même là il y a des pubs.
Même dans mes rêves il y a de la pub, j’ai rêvé que j’appelais Cassius, puis Etienne de Crecy pour enfin parler à Laurent Garnier. Pour finir sur un spot de Tonygencil.
Je ne sais même pas si ça existe encore.
J’ai trop de sollicitations tout le temps dans tout. Je suis surinformé, ça ne passe plus dans l’entonnoir que j’ai sur la tête. « On vous crée des besoins » disait mon prof d’éco au lycée. J’ai mis longtemps à comprendre. Je suis ce genre de stagiaire qui comprenait vite oui, mais à qui il fallait expliquer longtemps.
J’embrasse pas la Belle aux bois dormants, je lui bouche le nez. Si elle a de l’humour elle comprendra.
Donc j’embrasse pas la Belle aux bois dormants. Je lui fais une Louis 16. Je lui balance de la farine pendant son sommeil. A la JacKass en faisant les cornes et je lui crie « LOUIS 16 » . Si elle a de l’humour elle comprendra.
Une fois réveillée, je l’emmène sur le guidon de mon BMX. Et j’imagine qu’elle me chante des mots doux de Rn’B dans le creux de l’oreille. Faut juste que je fasse gaffe à ce que mon psoriasis se voit pas.
Boy!
Oh Boy!
J’ai peur des chevaux. Mon fidèle destrier c’est soit un BMX ou une planche à roulette.
Peur des chevaux..
Bizarre pour un petits fils de muletier.
Je crois que ceux que je hais le plus, c’est les jeunes vieux.
Les jeunes qui pensent déjà comme des vieux.
Putain…
Je trouve ça super artistique et romantique de
voir un caddie,
sorti de nulle part, posé nulle part.
En pleine rue sur un trottoir,
dans ma campagne.
Echoué là..
Comme un vaisseau pirate.
Comme une carcasse de voiture brûlée.
C’es tellement puissant et fascinant comme vision.
Les fosses à fumier me fascinent. Oui je suis fasciné en ce moment. On en avait une avant au hameau. On a un parking maintenant. C’est l’élévation sociale. J’ai entendu des histoires de puberté il y a peu de temps. La campagne est pas commode avec les femmes, avec les filles.
Didier, Georges, Claude, Martine, Jeanine, Jean Louis, Noel, Dominique et consorts vous êtes partis du bled.
Et je vous déteste.
Je vous déteste d’être partis.
Vous êtes où les gars? Y’a plus de taulier ou quoi? Heureusement les témoins de Jéhovah m’ont dit que.
J’ai vu des durs, complètement crevés, limite sur les jantes.
Fourré aux doutes, je suis entouré de gens qui savent que.
Donc ça va.
Vous n’êtes plus là, la boulangerie non plus, les vaches non plus et encore moins de mobylettes.
Ils disent que ça fait trop de bruit.
…
Mais je n’ai rien à craindre.
Des lotissements vont se construire ici. Des gens que je connais pas et dont je me bats les couilles vont construire des maisons. Des maisons toutes les mêmes. Sauf pour les plus aisés, des maisons plus hautes pour pas voir les autres « autres » qu’ils ne connaissent pas non plus. On dit « aisé » on ne dit pas riche. Ca ferait trop brut. Aisé, c’est quand tu transpires pas sous les bras quand tu danses en soirée.
Avant, ici, on avait toujours 1 TER de retard sur la mode. Je rends grâce au Dieu l’Internet car depuis, je crois que c’est fini. Sauf pour les musiques en boites de nuit.
Des gens bien, des maisons bien , des jardins bien …
A l’image de ma société.
Un concours d’imitations.
Un concours d’imitations.
Et je demande pardon à maman pour l’avoir tanné au collège, pour avoir voulu les mêmes fringues que les autres. Les mêmes coupes de cheveux et les mêmes sacs à dos.
Pour ressembler aux autres cons et connes.
Je ne regarde plus la télé, je regarde vos stories instagram.
Putain même là y’a de la pub..
Des gens bien, des maisons bien , des jardins bien …
A l’image de ma société.
Un concours d’imitations.
Longue vie.